Chronologie
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L'année de ma naissance sur la planète Moranda. Ma planète ne possède rien de bien intéressant, elle n'a pas une armée puissante, c'est une petite planète, ses habitants ne sont pas particulièrement sensibles à la Force, elle ne possède pas de ressources naturelles hors du commun. Sa principale source de revenus provient du lait des Parass, une espèce native de la planète, très semblable à des chèvres mais de la taille d'un cheval. Ce lait n'est pas un produit de luxe qu'on s'arrache dans la galaxie, ce n'est pas un lait miracle qui résout tous les problèmes d'impuissance. Tout au mieux on lui aura trouvé d'aider à apaiser les migraines, si vous y croyez très fort. Non, la seule particularité de ce lait est de ne pas provoquer de réaction allergique chez les personnes ne supportant pas le lactose. Le goût du lait, les bienfaits du lait sans les maux d'estomac !
Quand à moi, je suis née dans la ville de Moranda, la seule vraie ville et capitale portant le nom de la planète. Ma famille est l'une des plus aisées de Moranda, son succès s'est fait dans le lait de Parass il y a bien longtemps déjà et quand les échanges se sont multipliés mon arrière-arrière-arrière … ok … mon aïeul a été l'un des plus malins pour exporter et vendre sa production partout dans le système de la République. C'est ainsi que ma famille a continué à vivre dans la tradition familiale, les enfants se partageant cet héritage et chacun en prenant un grand soin. J'étais la plus jeune de ma famille, deux grandes sœurs, de onze et neuf ans mes ainées, et deux parents aimant. Un petit monde parfait et je dois l'avouer, je considère avoir été protégée et gâtée par ma famille. Je n'ai pas eu une enfance difficile, ça serait un mensonge mais je n'ai jamais non plus été dans l'ambiance familiale. Mes sœurs s'intéressaient au Parass, à la production, aux ventes, aux opportunités d'achat, au rachat du premier concurrent pendant que moi je rêvais sur mon lit. Je rêvais de voyages, de découvrir la galaxie, je rêvais de voir un jour le Sénat sur Coruscant, de rencontrer un Jedi. A douze ans, alors que mes sœurs étaient déjà bien ancrés dans l'entreprise familiale, j'annonçais la couleur : je serai Sénatrice !
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Après l'annonce de mon souhait de ne pas rester dans l'entreprise familiale et cela dès mon plus jeune âge, je m'attendais à une réaction vive de ma famille. Même à onze ans, j'étais consciente que je voulais sortir d'un cercle bien huilé fonctionnant depuis des années. Mes deux sœurs prirent la nouvelle avec surprise et n'apprécièrent pas vraiment, même beaucoup plus jeune qu'elles, elles m'aimaient énormément. Mes parents en revanche me soutinrent immédiatement, sans doute parce qu'ils avaient compris. Je serai toujours la plus jeune de mes sœurs, toujours bien plus jeune qu'elles, le temps que je sois majeure elles auraient décidé de l'avenir de l'entreprise pour les vingt prochaines années. Alors mes parents me soutinrent et quand je m'inscrivais dans le cursus politique de mes études, alors que j'avais 17 ans, mes sœurs m'encouragèrent aussi.
J'ai toujours été une bonne élève, une très bonne élève. Je voulais prouver à ma famille que je me donnerai les moyens de réussir dans mes études et année après année je brillais par mes résultats. Travailleuse forcenée et perfectionniste, je m'entrainais à parler, à me tenir en société, j'ai pris des cours de théâtre sur le conseil du Sénateur de ma planète. Avant de commencer mes études de politique, je savais jouer la comédie, aimer ce que je n'aimais pas, être amie avec tout le monde, faire couler des larmes sur commande ou m'enjouer dans la plus triste situation. J'étais armée et prête à entamer mes études.
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Meilleure élève de ma promotion, le bruit courrait dans mon université que je serai un jour la Sénatrice de Moranda et j'adorai cette idée. Plus j'en apprenais sur la politique galactique, sur la République, sur le Sénat et son fonctionnement et plus j'étais persuadée d'être dans le bon chemin. Je ne serai jamais une combattante, j'ai essayé de tirer avec d'autres élèves, je suis nulle pour ça, je ne sais pas me battre. Non, je ne serai pas une héroïne de guerre mais je serai l'héroïne qui empêchera les guerres, qui les arrêtera ! Forte de mes convictions, persuadée que je serai l'ultime force du Bien au Sénat dans quelques années, je postulais pour un poste d'assistante du Sénateur de Moranda une fois ma troisième année d'études terminée. Nous étions cent à postuler mais je me jurai que si j'avais la place, alors ça serait le signe de toutes mes certitudes : je suis fait pour être Sénatrice.
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C'était la première fois que je mettais le pied sur Coruscant mais j'en connaissais la carte par cœur. Trois semaines plus tôt j'avais appris que j'étais sélectionnée pour être l'assistante du Sénateur. J'avais tout étudié du Sénat avant de venir, j'avais localisé les endroits les plus importants, même une liste de restaurants sympathiques. Tout était prévu et ce stage qui couronnait mes études devait être la consécration de mon apprentissage. Après tout je me l'étais promis, je serai la Sénatrice du Bien si j'avais ce stage et je l'ai eue ! J'ai toujours cru en la Force et bien c'était un signe de la Force sur ma destinée, que je ne me trompais pas !
Je savais tout ce qu'il fallait savoir sur la politique et que les livres peuvent vous apprendre, maintenant j'allais voir comment les choses se passaient vraiment, j'allais voir comment se joue vraiment la politique galactique. J'étais préparée à tout … sauf à ce qui arriva.
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Mon stage se termine dans quelques jours et je vais rentrer chez moi. Je devrai être triste et déçue, j'ai toujours voulu être Sénatrice, j'ai toujours voulu vivre sur Coruscant et utiliser de la politique pour préserver la paix. La vérité est tellement différente et tellement douloureuse. Coruscant est une belle ville quand vous restez dans les bons endroits, elle est vivante autant qu'on puisse l'être, le Sénat est magnifique et son agitation incroyable … Pourtant je ne me sens pas bien. Comme si j'étais sale et qu'aucune douche ne pourrait jamais enlever la crasse que je porte sur mes épaules.
J'ai rapidement compris que le Sénat n'est pas ce que j'imaginais. Mensonge, manipulation, menace, chantage, voilà ce que j'ai découvert et je l'ai pris dans le visage comme une claque violent. Je n'étais pas candide au point de croire que ces choses n'existaient pas mais d'en voir autant. Les situations sont de plus en plus compliquées et violentes partout dans la galaxie, dans la République mais personne ne semble pouvoir prendre de décisions et celles qui sont prises sont souvent ridicules. Les Sénateurs mettent des petits pansements roses avec des dinosaures sur des plaies profondes et sanglantes.
Le Sénateur de Moranda était loin d'être ce que j'imaginais. Moranda est une petite planète sans grand impact, sans un grand poids politique parce qu'elle n'a rien à offrir. Voilà ce qu'il m'a dit pour m'expliquer son faible engagement au près des autres Sénateurs. Il se satisfaisait de sa situation, jour après jour me sermonnant sur ce qui était « vraiment important », notre planète va bien, n'est pas en danger, c'est l'essentiel. Il ne s'intéressait par à la République ou aux autres planètes, uniquement à Moranda et plus encore à sa place. En étant discret, m'expliquait-il, un Sénateur n'a pas à craindre les ragots et les coups tordus. Mais, me disait-il encore, il faut savoir se protéger.
Et c'est là qu'ont commencé les « missions pour Moranda ». Il s'était rendu compte que je discutais très facilement avec les autres Sénateurs et leurs assistants et il m'avoua aimer ça. Il m'avoua que j'étais là parce que j'ai fait du théâtre, parce que je sais mentir et enfin parce que je suis … belle. Le pire argument possible mais aussi le meilleur. J'ai rencontré de nombreux sénateurs, de nombreux assistants, des femmes de sénateurs et des époux de sénatrice. Collecter des informations sur les autres sénateurs, voilà mon vrai travail, avoir si untel couche avec quelqu'un qui n'est pas sa femme, si son assistant ne lui procure pas des substances. Je ne suis fière de rien de ce que j'ai fait et j'ai fait bien des choses. J'ai menti, j'ai couché, j'ai prétendu être amoureuse, j'ai fait chanter … j'ai fait ce que je devais pour « le bien de Moranda ». Je n'en suis pas fière, pas le moins du monde, je me sens affreusement sale. Pendant les soirées je restais dans l'ombre du Sénateur, discrète et silencieuse, j'écoutais, attentive à tout ce qui se passait autour de nous, à tout ce qui se disait sauf à ce que le Sénateur disait. Je faisais ensuite un rapport sur ce que j'ai appris d'intéressant. Oh ne vous trompez pas, je n'ai pas déstabilisé la politique galactique, non je parle là de Moranda. Imaginons qu'un Sénateur souhaite alléger les imports de notre produit phare, il était important qu'il change d'avis. Une sénatrice d'une planète voisine souhaite commence l'élevage de nos Parass ? Hors de question, cette idée doit lui passer ou elle doit disparaître. Ce n'était jamais des Sénateurs de systèmes majeures, ça n'avait aucune influence et pourtant même à ce niveau, tout était mensonge et tricherie. Comment pouvait-ce être au plus haut niveau alors ? Pire encore à n'en pas douter.
Voilà où j'en suis, à trois jours de la fin de mon stage. Mon rêve s'est brisé, désintégré jour après jour depuis un an. Tout ce que j'ai fait, tout ce que j'ai dit, tant de mensonges, il n'y a pas assez de savon dans la galaxie pour nettoyer ma bouche ou mon corps. Je vais rentrer et que dire, que faire alors devant ma famille ? Mes parents ont proposé de me payer quelques vacances après mon stage, quelques signifiant pour eux deux mois et je crois que c'est ce que je vais faire. Rentrer, dire bonjour, sourire en disant que tout était mieux que j'imaginais et partir. Je ne sais pas où je vais aller, quelque part où il y a beaucoup d'eau, beaucoup de savon et aussi peu de politiciens que possible. Manaan peut-être ?
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Nous voilà douze jours plus tard, je suis de retour sur Coruscant et j'attends la prochaine navette en partance. Je suis rentrée sur ma planète, j'ai retrouvé ma famille et j'ai réussi à les convaincre que tout avait été très bien. J'ai passé une année entière à mentir aux autres mais surtout à me mentir à moi-même, je suis devenue vraiment experte en mensonge. Il n'y a qu'à mon père que je ne mens, je n'arrive pas à lui mentir, mille personnes pourraient me croire mais lui sauraient encore que je ne dis pas la vérité. C'est un espèce de pouvoir qu'il détient. Nous avons eu une longue discussion lui et moi. Il m'a dit beaucoup de choses, certaines que je ne voulais pas entendre comme son inquiétude pour moi quand je lui expliquais ce que j'avais fait cette année moins le sexe bien sûr, je me voyais mal parler sexe avec mon père. Il en a dit d'autres qui m'ont fait beaucoup de bien, l'entreprise familiale obtenait de brillants résultats grâce à mes deux grandes sœurs qui faisaient un travail prodigieux. Quand je lui ai demandée s'il pense que je me suis trompée de voie, il m'a sourit et m'a dit que je ne suis pas la première membre de la famille à ne pas suivre le chemin de la famille. Je m'en doutais bien sûr, si tous les membres de la famille avaient effectivement suivis ce chemin la société compterait des centaines de dirigeants avec les années. C'est là qu'il m'offrit un sabre-laser. Pas fonctionnel, il manque des pièces m'a-t-il dit mais n'a jamais réussi à trouver comment l'ouvrir. Il appartenait à un ancêtre et c'était tout ce qu'il restait de lui dans la famille, un sabre-laser non fonctionnel mais pour mon père c'était la preuve que je pouvais être ce que je voulais. Il me raconta comment petite, jusqu'à mes dix ans, j'étais persuadée que je serai une Jedi. La politique, bien plus réaliste, avait remplacé ce rêve un peu fou, si je pouvais sentir et utiliser la Force de la bonne façon, je serai sans doute déjà formée.
C'est donc un long voyage de deux mois pour trouver ma voie qui allait s'engager. J'ai emmené ce qu'il me faut pour ce voyage, sans excès. Je ne veux pas voyager d'hôtel de luxe en hôtel de luxe, je veux vivre simplement, découvrir des planètes riches en lieux naturels, m'éloigner des villes et de leurs jeux politiques. Ma première destination sera Naboo puis je m'éloignerai progressivement du noyau vers la Bordure Extérieure. J'ai emmené le sabre-laser, même non fonctionnel, comme une façon de me souvenir des mots de mon père : tu peux être ce que tu veux, Mercy. Si c'était si simple que cela. Mon plan de carrière, étalé sur les dix dernières années s'est écroulé comme un château de cartes en un an. Qu'est-ce que je veux être maintenant ? Je n'en sais toujours rien. Je ne sais même pas à quel membre de ma famille appartenait ce sabre-laser mais clairement pas à une femme. La poignée est beaucoup trop grande pour mes mains, même à deux mains je peine à avoir une bonne prise. Qui qu'ait été mon ancêtre qui a tenu ce sabre avait de vraiment grandes mains. Et puis qui sait, peut-être trouverai-je l'illumination pendant ce voyage !